Le Rhin à gauche, à droite vue partielle du Plan d'Eau de Plobsheim, entre les deux, la digue tiroir
En 1970, près d’un quart du ban communal fut inondé pour la mise en service du Plan d’Eau de Plobsheim, servant à compenser les manœuvres d’écluses de la chaîne des centrales hydroélectriques situées en amont. Vaste de plus de 650 hectares, il recouvre l'ancienne forêt alluviale qui longeait le Rhin, dans laquelle vivaient plusieurs familles de pêcheurs, d'agriculteurs, de restaurateurs.
Le Plan d’Eau joue un rôle très important pour l’avifaune : 13000 individus sont recensés en moyenne lors des comptages hivernaux, ce qui fait de ce site le plus important sur le Rhin pour le nombre d’oiseaux observé en hiver. Il héberge par ailleurs plus d’une quinzaine d’espèces rares.
Aujourd’hui, les oiseaux partagent ce territoire avec les voiliers, puisqu’il accueille également une base nautique. Pour les sports et loisirs aquatiques, le plan d'eau de Plobsheim reste en effet un lieu de rendez-vous plébiscité par les amateurs de planche à voile ou de bateau de plaisance.
AVANT LE PLAN D'EAU, DANS LA FORÊT ALLUVIALE DU RHIN
A la suite, afin de conserver vivante la mémoire de ces lieux de nature et de vie disparus sous les flots, nous vous présentons quelques images heureusement préservées. Seul reste le souvenir et la nostalgie de cette forêt, rasée pour la sécurité des hommes. Dans le cœur des Plobsheimois, jamais ne s'effacera le souvenir des ces endroits merveilleux. Notre Association veillera à la préservation de ce qui peut l'être.
Avant le Plan d'Eau Après le Plan d'Eau
Sur la carte de gauche la situation avant le Plan d'Eau. Sur la carte de droite, le contour du Plan d'Eau en rouge avec les lieux-dits numérotés qui sont décrits ci-dessous (du nord vers le sud)
1 La maison du cantonnier du Rhin près de l'Altenheimer Hof 2 La ferme et restaurant "Altenheimer Hof" 3 Le restaurant "Au tournant du Rhin"
4 La ferme Finck
5 La maison forestière de Plobsheim "Bubenkopf"
6 La ferme "Schneider Michel"
7 Les "Sept Écluses"
8 Barrage sur la rivière "Altrhein"
Attention : les photos ci-dessous proviennent de la collection de Eugène Lauffenburger. Elles ne sont pas libres de droits et toute reproduction sans autorisation de la part du Giessen fera l'objet de poursuites.
1La maison du cantonnier du Rhin
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Située au bord de la digue près de l'Altenheimer Hof, elle logeait le cantonnier chargé de l'entretien des berges du Rhin. Le dernier à effectuer cette tâche s'appelait Fuchs. La même maison existe (encore) à l'endroit des Sept Écluses.
Altenheimer Hof, cette ferme et le restaurant situé à côté, ont pris le nom du village d'Altenheim en pays de Bade, de l'autre côté du Rhin.
Le restaurant "Altenheimer Hof", était très fréquenté les dimanches par des citadins venant s'installer au bas de la digue, au bord du Rhin. Les serveuses descendaient l'escalier aménagé dans la pente de la digue, leurs bras portant un plateau chargé de bières et de limonades. Traditionnellement début mai, les conscrits de Plobsheim, avec une remorque agricole, tirée par des chevaux ou un tracteur, passaient une journée à cet endroit.
Le 5 décembre 1888, une commission municipale d'Altenheim en Bade se rendit en forêt, afin de réaliser l'inventaire d'une coupe de bois. A la fin de leurs travaux, ils décidèrent de traverser le Rhin à bord d'une barque à fond plat pour se rendre à l'auberge de l'Altenheimer Hof côté alsacien, afin de se réchauffer et prendre une collation. Au retour il faisait nuit, dans le froid et le brouillard, en re-traversant le Rhin, cette barque dans laquelle avaient pris place huit personnes : le maire, cinq conseillers et deux gardes forestiers a chaviré. Une seule personne a réussi à survivre à cette tragédie : Johannes Strosack. Une stèle commémorative se trouve au cimetière d'Altenheim.
3Le Tournant du Rhin
Le "Tournant du Rhin" était un restaurant construit au bord du Rhin en contrebas de la digue des hautes eaux. C'est pour cette raison qu'il était sur pilotis, le sous-sol étant inondable, ce qui ne manquait pas d'arriver presque tous les ans au moment de la fonte des neiges dans les Alpes et le Jura, faisant monter le niveau du Rhin. Cette période était appelée Kirscherhin.
4 La ferme Finck
Continuant par le chemin de la maison forestière, on arrivait à la ferme de la famille Finck. C'était également une maison de pêcheurs. La rivière Geissengiessen ou Hadel passait derrière la maison où étaient amarrées des barques de pêche et où séchaient la plupart du temps des filets de pêche ou carrelets. Les gens avaient pris l'habitude de vivre et travailler dans cet environnement isolé, c'était leur mode de vie et ils s'en contentaient.
5 La maison forestière Bubenkopf
De l'autre côté de la digue des hautes eaux, par un petit chemin tournant à gauche, on arrivait à cette maison forestière de Plobsheim. Un peu plus à droite du chemin coulait une source qui sortait de terre, créant un petit bassin à l'eau très pure et où poussaient des plantes aquatiques. Ce petit cours d'eau se jetait un peu plus au nord dans le Geissengiessen. L'étendue de la forêt communale justifiait la présence d'un garde forestier à plein temps. Il était de tradition, tous les ans au 1er mai, la société de musique "Le Progrès" de Plobsheim ainsi que la chorale "Concordia", donnaient un concert en pleine nature, sur le pré à côté de la maison forestière. Les habitants du village venaient à pied pour ce moment de détente et de convivialité.
6 La Ferme Schneider Michel
Charles Lauffenburger et ses enfants René, Madeleine et Eugène
Située en pleine forêt du Rhin, cette ferme avait été construite en 1709. Communément appelée Schnidermichel, elle abritait deux familles de cousins auxquelles elle avait été transmise de génération en génération : les Bauer au rez-de-chaussée et les Lauffenburger à l'étage. Au fond de la cour, coulait le Geissengiessen, communément appelé Hadel, et qui se jetait dans le Rhin plus au nord, à hauteur du restaurant "Au tournant du Rhin".
C'est là qu'étaient amarrées les barques à fond plat que les deux familles utilisaient ensemble journellement pour aller pêcher dans les cours d'eau alentours et dans le Rhin. Leurs épouses, en tirant une petite remorque, venaient à pied à Plobsheim et dans les villages environnants, pour vendre leurs poissons. En même temps, ces pêcheurs professionnels étaient également agriculteurs, élevant des animaux dans la ferme. Leurs enfants venaient tous les jours à pied et en sabots à l'école du village.
Le lieu-dit "Sept Écluses" (aussi appelé quelque temps le Rhinland, du nom du restaurant qui y était exploité) est l'endroit où se trouvait le plus important ouvrage d'art sur le canal de décharge de l'Ill.
Afin de protéger la ville d'Erstein et toute la contrée en aval jusqu'à Strasbourg des inondations dues aux hautes eaux, on avait construit le Canal de Décharge de l'Ill. Celui-ci déviait de l'Ill au sud d'Erstein par le barrage du Borschey et se dirigeait vers le Rhin au sud de Plobsheim, en passant par le barrage des Sept Écluses.
Les Sept Écluses, vue en aval Cliquez pour agrandir
Ce barrage avait sept ouvertures de 4 m de largeur chacune et était équipé à l'origine de vannes métalliques à manœuvre manuelle, d'une passe-nacelle et d'une échelle à poissons. Les manœuvres de barrages étaient assurées par des gardes barragistes logés à proximité des ouvrages et reliés entre eux par une ligne téléphonique spéciale. Aux Sept Écluses, c'est un nommé Schnepf qui était chargé de cette fonction. L'ensemble des travaux de construction du canal de décharge de l'Ill et des ouvrages annexes s'est échelonné de 1886 à 1891.
Maison du Cantonnier du Rhin
Une crue sévère de 1910, d'une ampleur exceptionnelle a montré que le barrage de Plobsheim était trop petit. En 1912, il fut complété par une passe de décharge consistant en un pont de près de 40 m d'ouverture dans la digue du Rhin (voyez la photo aérienne). Cet ouvrage était le premier de la région en béton armé. Après la crue exceptionnelle de janvier 1955, divers travaux d'amélioration et de sécurisation eurent lieu sur le canal de décharge de l'Ill, dont l'électrification des vannes des Sept Écluses.
L'endroit était très apprécié à la fois des pêcheurs, des promeneurs et des citadins pour son cadre exceptionnel et son environnement de nature intacte. Durant la belle saison, le canoë club de Strasbourg organisait des concours de canoë kayak
Avec les aménagements au Plan d'Eau de Plobsheim, le barrage des Sept Écluses n'avait plus son utilité de régulation des eaux et il fut démoli. Seules les fondations se trouvent encore sous le parking. L'endroit a peu à peu perdu son nom pour s'appeler le Rhinland. Aujourd'hui, nous souhaitons que cet endroit retrouve son nom d'origine, celui que nos anciens lui avaient donné : les Sept Écluses.
La photo ci-dessus a été prise à peu près au même endroit que celle en dessous, à 50 années de différence.