Le Moulin de Plobsheim
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Histoire du Moulin de Plobsheim
Des origines à nos jours
L'acte fondateur du moulin de Plobsheim, c'est le document qui a été signé le 8 août 1629 et enregistré à la Chambre des Contrats à Strasbourg.
Les Zorn autorisèrent de construire un moulin à farine avec deux tournants et un foulon, à un certain Jean STARCK, bourgeois de Strasbourg. Celui-ci s'est engagé à le construire à ses frais, sur le terrain communal. La durée du contrat était de 18 ans. En contre partie, Starck s'est engagé à payer à la commune de Plobsheim par an 1 livre et 10 schillings comme loyer foncier, et à la seigneurie 13 quartauts de méteil (XIII viertel Moltzer) pour le droit d'eau, et cela, dès que le moulin sera en fonction. A la fin de ces 18 années de fonctionnement, et lorsque Starck se sera acquitté de ses loyers, il en sera propriétaire.
1629 Extrait de l'acte fondateur du moulin de Plobsheim (AMS) KS 465 (Photo R.D.)
État du moulin à l'origine: Les bâtiments du moulin se trouvaient uniquement sur la rive gauche de la rivière. Un petit barrage réglait le débit d'eau dans les deux coursiers qui entraînaient les roues. Une passe-nacelle permettait aux pêcheurs de passer par cet endroit avec leurs barques à fond plat. Par la suite, le moulin a subit de nombreuses transformations et agrandissements qui nous sont connus également par les archives. Aujourd'hui, du moulin à moudre, à égruger le tabac ou à fouler le chanvre, il ne reste rien ou si peu. Seules quelques meules en décoration dans le jardin et le bruit de la petite chute d'eau derrière le grand mur en moellons datant de l'origine, rappelle qu'il y avait là un des grands moulins de la région. Les grands bâtiments qui abritaient autrefois les machines de meunerie ont été transformés en logements où vivent aujourd'hui les descendants de la lignée Deuchler-Antoni.
En un peu plus de cent ans, le moulin de Plobsheim a changé souvent de propriétaire et il a été loué plusieurs fois. Les familles de meuniers se connaissent et se rencontrent souvent. 1743 Jean-Michel Greiner et son épouse ève Simon achètent le moulin : 1745 : Jean Valentin I DEUCHLER de Niederroedern, épouse la veuve GREINER Avec l'arrivée de Deuchler à Plobsheim en 1745, la situation patrimoniale va se stabiliser et le domaine va rester dans la même famille et sa descendance jusqu'à nos jours. C'est avec lui que le moulin va connaître ses plus grandes transformations et agrandissements. En 1750, Deuchler a loué un terrain communal sur la rive droite du Mühlbach dont nous avons retrouvé le contrat. "L'affaire du moulin" Disposant à présent de terrains de part et d'autre du Mühlgiessen, le meunier Deuchler a considérablement augmenté la capacité de son moulin. Il a fait agrandir les bâtiments actuels sur la rive gauche, et construire de nouveaux bâtiments sur la rive droite, plaçant ainsi le moulin à cheval sur la rivière. De deux tournants et une ripe à chanvre et un moulin à tabac, il est passé à sept tournants.
Esquisse relevée sur place, ayant servi à établir le plan ci-dessous (ADBR Photo R.D.)
Sur ce plan de 1759, on voit la disposition des 5 roues, 5 meules et 3 ripes (doc. DRAC)
à suivre...
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Cette multiplication des roues à aubes a nécessité beaucoup plus d'eau, et Deuchler a tout fait pour amener le plus de courant possible. Les travaux qu'il a entrepris pour faire fonctionner toutes ses roues ont eu de graves conséquences :les hautes eaux, qui survenaient pratiquement tous les ans au début de l'été à la période de la fonte des neiges gonflaient aussi bien dans l'Ill que dans le Rhin (Kirscherhin). Au moulin de Plobsheim, ces hautes eaux ne pouvaient plus être évacuées par la décharge qui avait été supprimée, et elles s'engouffraient dans le Bächersandel, qui reliait le Mühlgiessen au Dorfgiessen. En conséquence, les champs ainsi que le village était sous eau. En 1758, on signala une inondation tellement importante, que l'eau rentrait par les fenêtres des maisons.
On peut comprendre que les habitants du village se soient plaints auprès de l'intendant d'Alsace, autorité supérieure de la région.
L'intendant d'Alsace chargea l'inspecteur Clinchamp, de venir à Plobsheim et de faire un état des lieux afin de déterminer les responsabilités dans cette affaire.
Le 4 août 1759 l'intendant d’Alsace LUCÉ rédige une ordonnance par laquelle il ordonne à Deuchler de remettre à l'état initial tous ses travaux réalisés sans autorisation.
En 1761, il approuve le procès verbal établi par l'ingénieur Christiani. Les travaux demandés ont été réalisés. Tout changement effectué par le meunier sera puni d’une amende de 500 livres.
Fin de "l'Affaire du Moulin"
Après toutes ces années de changements et agrandissements dans la tourmente, il semble que le moulin ait retrouvé quelque peu sa sérénité. Les nouvelles installations semblent définitivement permises et agréées. Valentin Deuchler et ève Simon font construire leur nouvelle maison d'habitation prolongée par une grange, aujourd'hui transformée en logement, en cette année 1763.
Initiales sur le poteau cornier : IVD - EVAS 1763 = Jean Valentin Deuchler – ève Simon (Photos R.D.)
En 1784 Jean Valentin DEUCHLER I vend le moulin-à son frère Jean Martin DEUCHLER et à son neveu Jean Valentin DEUCHLER II
1785 Jean Valentin DEUCHLER I épouse Marie Catherine BAUMANN, veuve BUBENHOFER, il meurt quelque semaines plus tard
Cette petite maison ci-dessus située au bord du Mühlgiessen figure déjà sur le plan n° 3. Elle est décrite comme four à pain et buanderie. Sur d'autres documents, elle est signalée comme "Wachhäusel". (Photo R.D.)
De Deuchler à Antoni
1786, Jean Valentin II, fils de Jean Martin épouse Catherine Groskost. Ils eurent 7 enfants, dont un garçon : Martin, né en 1797
1826, Martin Deuchler, est le nouveau propriétaire. Il a épousé Salomé Leininger, fille de meunier à Lingolsheim. Ils auront 6 enfants dont Catherine.
1849, Jacques Antoni I, meunier, qui venait également de Lingolsheim, a épousé Catherine Salomé, âgée de 16 ans.
Dès 1851, Antoni a été confronté au problème d'alimentation en eau de son moulin. Le Canal du Rhône au Rhin, dont le dernier tronçon avait été mis en eau est traversé à hauteur d'Erstein par le cours d'eau de la Krafftwasser, dans lequel on avait aménagé un barrage à poutrelles. Jacques Antoni s'est plaint du manque d'eau dans son moulin et demande un dédommagement.Cela va donner lieu à une longue procédure, plusieurs fois, les experts vont se relayer proposer des solutions. 1868, par décret, Napoléon III a annulé l'arrêté du Conseil de préfecture de 1866 et condamné l'état aux dépends.
La Famille Antoni s'agrandit
1849, Jacques Antoni I s'est marié avec Catherine Salomé Deuchler. Ils ont eu 8 enfants dont Jacques II né en 1853
1871, Catherine Salomé est décédée à l'âge de 38 ans.
1876, Jacques II s'est marié avec Marie Kauffmann. De leur union sont nés 8 enfants dont Jacques III Émile né en 1880 et Ernest Jean né en 1893.
Jacques II Antoni et Marie Kauffmann (Documents Famille Fuchs - Photos R.D.)
Vers la scierie et le restaurant La première transformation s'est opérée sur la rive droite de la rivière. Une scierie a été installée et a été actionnée par une roue de moulin. Sous un grand hangar était installée également une batteuse. Le barrage sur le Mühlgiessen avait été couvert et reliait les deux bâtiments de part et d'autre du moulin En 1901, le grand bâtiment du moulin situé sur la rive gauche de la rivière a été ravagé par un incendie. Après cette catastrophe, il n'était pas question de recréer un moulin. Les épais murs étaient restés debout, sans la toiture, à l'intérieur, tout a été détruit.
à suivre...
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Quelques années après, en 1906, la partie du moulin sur la rive droite où était installée la scierie a été cédée au moulin Becker à la Ganzau. Ce nouveau propriétaire à fait construire une turbine produisant de l'électricité en utilisant cette énergie pour son moulin. Une ligne directe avait été installée de Plobsheim jusqu'à la Ganzau. Cette nouvelle installation fournissait également le courant pour le domaine du Kempferhof, la maison du cantonnier près des Sept Écluses, et les maisons du Grosswoerth, quartier autour du moulin qui en a profité
La nouvelle maison de la "turbine" avec ses vannes (Document Famille Fuchs)
Dans le bâtiment sinistré sur la rive gauche, les travaux ont été entrepris. à l'origine, l'immense toiture recouvrait l'ensemble des bâtiments avec un toit à deux pentes. La nouvelle toiture se compose de quatre pentes avec un mur gouttereau au milieu. Dès lors, la scierie a été transférée dans ce bâtiment et là, elle était actionnée par une roue de moulin, puis par la suite, par un gros moteur électrique alimenté par la turbine d'en face. Le reste du bâtiment a été aménagé en appartements.
Le domaine a été partagé entre les deux frères Jacques III et Ernest Jean à l'amiable. En effet, Jacques a cédé à son frère cadet Ernest, une partie du terrain du moulin, afin que celui-ci puisse y construire le restaurant. Ensemble ils ont exploité la scierie, Jacques s'occupant du sciage des grumes et Ernest s'occupant du négoce de bois.
Annonce publicitaire parue dans un programme de fête villageoise en 1913
Jacques III Antoni a épousé Marie Heizelmann originaire de Strasbourg-Neuhof. Ils ont eu quatre filles
Jacques III Émile et ses quatre filles : Marthe, Jacqueline, Madeleine et Suzanne (Documents Famille Fuchs)
Ernest Antoni a construit le restaurant "Au Moulin". Il était marié à Lucie Danner et ils ont eu trois enfants : Alfred , Marie et Yvonne. De l'autre coté de la route, sous un hangar se trouvait la batteuse. C'est leur fils Alfred Antoni qui a géré la scierie dont l'exploitation s'est arrêtée dans les années 90. C'est leur fille Yvonne, mariée à Marcel Clauss, qui a exploité le restaurant "Au Moulin", dont la renommée avait attiré une clientèle de toute la région et même au-delà.
Le restaurant est fermé et a été transformé en appartements.
Sur la rive opposée du Mühlgiessen, dans la maison de la turbine, la production d'électricité a cessé dans les années 70. Becker a vendu sa propriété, et le bâtiment a été transformé en maison d'habitation.
Si un jour, vous avez la chance de pouvoir venir quelques instants dans la cour de ce moulin, prenez le temps de jeter un coup d'œil tout alentour. Vous constaterez que tout est harmonie et donne une impression de sérénité et de vie paisible. En dressant l'oreille, vous entendrez peut-être le doux murmure de la petite chute d'eau qui coule derrière le mur séculaire du moulin de Plobsheim, depuis longtemps longtemps encore…
L'histoire du moulin de Plobsheim a pu être écrite grâce au rassemblement de plusieurs sources et à un travail en commun. L'association "le Giessen" a contribué à cette synergie pour mener à bien cette reconstitution d'un chapitre de l'histoire de notre village. Grâce aux relevés concernant le notariat ancien, effectuées par Georgette Bapst aux archives départementales du Bas-Rhin, nous avons pu reconstituer depuis l'origine la liste de tous les propriétaires et locataires de ce moulin. Nous avons relevé à ces mêmes archives départementales et municipales de Plobsheim plusieurs gros dossiers concernant le moulin. Le travail documentaire et la compétence de Ludovic ont été précieux dans cette histoire que nous avons le plaisir de vous faire découvrir. Aujourd'hui, le moulin n'est plus en activité, ni pour moudre du blé, encore moins pour fouler du chanvre, ni pour la scierie qu'il était devenu au 20e siècle, mais la plupart des bâtiments sont encore là et témoignent de ces activités passées. Nous remercions chaleureusement les actuels propriétaires, descendants directs de la famille DEUCHLER-ANTONI, de nous avoir ouvert les portes de ces lieux chargés d'histoire.
Nous remercions tout spécialement les familles : Antoni, Fuchs, Goetz, Clauss, Nimsgern, Ohresser et Barth Tout ce qui précède ci-dessus est un condensé de l'histoire du moulin de Plobsheim, publiée dans l'annuaire de la Société d'Histoire des Quatre Canton à Benfeld.
René Deiber et Ludovic Seng - Association Le Giessen 2009
Abréviations : AMS Archives Municipales de Strasbourg ADBR Archives Départementales du Bas-Rhin DRAC Direction Régionale des Affaires Culturelles Photos R.D. René Deiber